Petit dragon, petite chantilly, petit pouik...
Belle en plume, boule d'amour, douce dame...
Gin
Belle en plume, boule d'amour, douce dame...
Gin
C'est dur de penser à eux, à tous ces monstres qu'on aime toujours trop, et qui finissent par se barrer toujours trop tôt. Dur de ne plus les tenir au creux de nos bras, de ne plus les entendre, de ne plus les voir. Et de ne plus les sentir. Ma Gin sentait si bon...
Alors on passe les doigts sur de vieilles photos, comme quand on passait nos mains dans leurs plumes, dans leur pelage. On se dit qu'ils ont fait leur temps, que c'est normal qu'il s'en aillent. On pense aux bons moments ; de toutes façon les mauvais deviennent bons avec le temps.
Mais dans le fond on a mal, quoi qu'on se dise. Quand je pense à ma Gin j'ai mal et seulement mal. Je veux passer mon doigt sous son bec, souffler des bouffées d'air chaud dans ses plumes et sentir l'odeur de sa peau. Je veux la voir sur mon bureau, à somnoler pendant que je fais mes devoirs, à poser pour mes cinquante mille photos, à rouspéter quand la musique est trop forte. Je veux la prendre dans mes bras, l'emmener se promener sur le guidon de mon vélo, la poser dans ma tête et courir dans le jardin, écouter ses gazouillis de poussin ou ses caquetements de poule dans mon oreille, la voir venir se nicher à coté du piano pendant que je joue.
Mais ce temps est révolu. Et tout ce que je peux faire c'est de penser le moins souvent possible à elle. De laisser s'envoler les rares souvenirs de sons, d'odeurs, de sensations, en rapport avec elle. De ne pas penser à son corps décomposé, à son squelette, enterré dans le fond du jardin, ni au fait qu'elle se soit faite bouffé par les vers qu'elle dégustait avec tant de délectation.
Oublier son regard, c'est ça qu'il faut.
Et arrêter d'écouter cette putain de chanson que je lui ai associé à partir du jour où je l'ai récupérée.